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EXPOSITION ANTI MACONNIQUE / PARC DE LA MAIRIE DE BORDEAUX

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Erwan

Erwan
Admin
Admin

Trouvé sur le web ....  study 


HENRI LABROUE L'anti maçon de 1940 dans le parc de la Mairie de Bordeaux


EXPOSITION ANTI MACONNIQUE  / PARC DE LA MAIRIE DE BORDEAUX Notre-combatEXPOSITION ANTI MACONNIQUE  / PARC DE LA MAIRIE DE BORDEAUX Labroue-copie-2


HENRI LABROUE
Né le 29 août 1880 à Bergerac (Dordogne).

Député de la Gironde de 1914 à 1919 et de 1928 à 1932.

Agrégé d'histoire et de géographie, Henri Labroue était passé par la Sorbonne et l'Ecole pratique des hautes études. Correspondant au Temps et chargé de mission par le ministère de l'Instruction publique, il accomplit de 1907 à 1909 un long voyage d'étude qui le mène d'Amérique du Nord en Extrême-Orient et en Inde. Nommé au lycée de Bordeaux, il s'y consacre de 1909 à 1914 aux cours de préparation à l'Ecole normale supérieure et occupe à la Faculté des lettres une chaire libre créée par la Chambre de commerce de Bordeaux.

Il se présenta à la députation aux élections générales des 26 avril et 10 mai 1914 dans la 6e circonscription de Bordeaux. Il fut élu au second tour par 5.621 voix contre 5.067 à Calmel et 4.009 à Caillebaud (Calmel, avec 3.652 voix, le devançant pourtant au premier tour de 486 voix).

A la Chambre, il s'inscrit au groupe républicain radical et radical-socialiste. Nommé membre de la commission de l'enseignement et des beaux-arts et de la commission des comptes définitifs et des économies, il vote pour le cabinet Viviani constitué le 13 juin 1914.

Lors de la mobilisation, en août 1914, il sert comme sous-lieutenant au 108e de ligne. Promu lieutenant en décembre 1914, il est blessé peu après à Pagny-sur-Meuse et reçoit la Croix de guerre ; il termine la guerre comme capitaine après avoir rempli diverses missions parlementaires aux armées.

De retour à la Chambre des députés, il est membre en 1916 de la commission des décrets et en 1917 de celle des affaires étrangères. Le 13 mai 1916, il passe ses thèses de doctorat ès lettres en Sorbonne sur Le rôle patriotique de la société populaire de Bergerac pendant la Révolution et sur La mission de Lakanal dans la Dordogne en l'an II.

Son activité parlementaire est diverse. Nous en retiendrons trois aspects : - en 1915, lors de la discussion de la proposition de loi tendant à établir le service militaire obligatoire au Sénégal, il s'élève, dans une intervention de haute tenue morale, contre l'argumentation des auteurs de la proposition. La conscription au Sénégal était, selon eux, justifiée par le droit de vote dont jouissaient les Sénégalais. Or, dit Labroue, ce droit est en fait un leurre et, de plus, aucun volontaire ne s'est présenté depuis le début de la guerre dans les bureaux d'engagement. La Chambre des députés n'en vote pas moins le texte qui lui est proposé.

Par deux fois - en 1916 et en 1918- le député de Bordeaux s'élève contre le privilège de la Banque de France et son renouvellement. Enfin, en 1917, il propose de modifier les dispositions réglementant la contribution sur les bénéfices industriels dus à l'état de guerre afin de préserver pendant la paix les possibilités d'investissement des industries françaises dont la puissance serait garante de la grandeur nationale.

Sur le plan purement politique, Labroue se représente à la députation en Gironde, tête de liste républicaine radicale mais il essuie deux échecs consécutifs. Il n'en poursuit pas moins son activité d'avocat à la Cour d'appel de Paris. En 1928, de nouveau candidat républicain radical dans la 7e circonscription de Bordeaux, il devance le député sortant Capus (républicain de gauche-alliance démocratique), obtenant 5.870 voix contre 5.691 et 3.023 à Cabannes (S.F.I.O.). Il l'emporte au second tour avec 7.433 voix contre 5.797 à Capus et 3.232 à Cabannes.

Inscrit au groupe de la gauche radicale - dont il est le vice-président- il est membre de la commission de l'enseignement et des beaux-arts en 1928 et de celle des boissons et enfin du travail en 1929. Son activité parlementaire est, cette fois, tournée plus précisément sur les problèmes locaux, et en particulier viticoles. Il fit en effet adopter comme rapporteur la très importante loi du 4 juillet 1931 sur la viticulture et le commerce des vins. En outre, il est l'auteur d'une proposition de loi tendant à rendre le vote obligatoire et il milite en faveur de la gratuité de l'enseignement secondaire pour les enfants des familles à revenus modestes.

Fidèle soutien des gouvernements représentatifs de la majorité sortie des urnes de 1928, il vote pour la loi monétaire présentée par le président Poincaré le 24 juin 1928. Il contribue par contre, le 25 février 1930, par son intervention talentueuse, à la chute du bref gouvernement Chautemps constitué le 21.

Appartenant à la majorité sortante, Labroue n'est pas réélu en 1932. Quoique arrivé en tête au premier tour avec 7.282 voix contre 5.509 à Cabannes (S.F.I.O.) et 3.509 à Bourdieu, radical-socialiste, il est battu au second tour, n'obtenant que 8.537 voix contre 8.819 à Cabannes.

En 1936, les résultats ne lui sont pas favorables, quoique la marge du second tour soit très faible. Le 26 avril, Cabannes obtient 5.814 voix contre 4.629 à Labroue, 3.249 à Micheau (indépendant) ; 1.466 à Paillé (communiste); 1.033 à d'Eaubonne (radical-socialiste) ; 1.022 à Bourdieu (radical indépendant). Resté seul en face de Cabannes, Labroue n'obtient que 8.916 voix contre 8.938 à son adversaire.

Après son échec de 1932, Henri Labroue s'était inscrit au barreau de Bordeaux et s'était consacré au Cercle de la démocratie locale qu'il présida.

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 29 août 1880 à Bergerac (Dordogne)
Décédé le 29 août 1964 à Nice (Alpes Maritimes)

Député de la Gironde de 1914 à 1919 et de 1928 à 1932







L'ECHEC DU COURS ANTISEMITE D'HENRI LABROUE À LA SORBONNE
(1942-1944)
Claude Singer
Le 15 décembre 1942, un étudiant d'histoire participe à une manifestation organisée pour protester contre le cours inaugural d'un obscur professeur, Henri Labroue, qui vient d'être nommé titulaire d'une chaire d'« Histoire du judaïsme», à la Sorbonne, grâce à l'appui des milieux collabora- tionnistes. Cinquante ans plus tard, ce même étudiant, devenu l'historien Jacques Dupâquier, a organisé, au même endroit, une petite cérémonie commémorant cet acte de résistance intellectuelle. À cette occasion, Claude Singer a retracé le parcours d'Henri Labroue et la brève existence d'un des très rares cours ouvertement antisémites de l'Occupation.
En 1940-1941, les premières mesures frappant les enseignants et les étudiants juifs ont été accueillies avec indifférence par une opinion publique encore traumatisée par la débâcle militaire de l'été 1940 *. Il est clair pourtant que la plupart des Français, récalcitrants à l'idéologie raciste à la veille de la guerre, ne se sont pas métamorphosés subitement, sous l'occupation allemande, en militantsantisémites. D'ailleurs, à mesure que le poids de l'occupation allemande devient plus lourd et que les actes de répression condamnent aussi, aux yeux de l'opinion publique, le choix de la collaboration avec l'Allemagne nazie, les Français critiquent de plus en plus ouvertement le gouvernement du Maréchal. Ils sont aussi de plus en plus nombreux à remettre en question la politique d'exclusion menée à rencontre des juifs. Perceptible à la fin de 1941, cette évolution se confirme en 1942, notamment en juin, au moment de l'obligation du port de l'étoile jaune en zone occupée, en juillet- août, au moment où les grandes rafles se multiplient dans toute la France et aussi, comme nous allons le voir, en décembre 1942, avec l'inauguration d'une chaire d'« Histoire du judaïsme» à la Sorbonne.
L'idée de créer un enseignement raciste à l'Université se fait jour dès l'hiver 1940, mais elle ne parvient à se concrétiser qu'en novembre-décembre 1942, plusieurs mois après le retour de Pierre Laval aux affaires et après la nomination d'Abel Bonnard au ministère de l'Éducation nationale. Les prédécesseurs d'A. Bonnard à ce ministère, le philosophe Jacques Chevalier et l'historien Jérôme Carcopino, avaient en effet tous les deux refusé la création d'une telle chaire: J. Chevalier



avait éconduit Claude Vacher de Lapouge (le fils de l'anthropologue Georges Vacher de Lapouge) en décembre 1940 et Carcopino avait agi de la même manière avec H. Labroue qui était venu le solliciter au cours de l'été 1941 1.
Quels sont donc les membres du gouvernement de Vichy qui sont à l'origine de la création d'une chaire d'« Histoire du judaïsme» en novembre 1942? Trois d'entre eux paraissent avoir joué un rôle déterminant dans cette affaire : Louis Darquier de Pellepoix, Pierre Cathala et A. Bonnard.
L. Darquier de Pellepoix, tout d'abord. C'est lui qui, en 1942, est directement à l'origine de la création de cette chaire. Ayant succédé à Xavier Vallat au Commissariat général aux questions juives en avril 1942, il expose publiquement et à différentes reprises, dès mai 1942, son projet de création d'une chaire d'« Histoire du judaïsme contemporain»2. Ce projet est ensuite transmis à Laval avec bienveillance (et insistance) par P. Cathala, secrétaire d'État aux Finances, qui non seulement connaît personnellement L. Darquier et H. Labroue, mais co-signe aussi le décret instituant la chaire d'« Histoire du judaïsme» à la Sorbonne3. Enfin, c'est Bonnard, ministre secrétaire d'État à l'Éducation nationale, connu pour ses déclarations ultra-collaborationnistes, qui attribue, le 12 novembre 1942, la chaire d'« Histoire du judaïsme» à H. Labroue.
O UN PARCOURS IDÉOLOGIQUE SINUEUX
Issu d'une vieille famille de notables poitevins et bergeracois (un de ses parents, Mgr Labroue de Vareille, aurait été évêque — réfractaire - de Gap sous la Révolution), H. Labroue est né à Bergerac (Dordogne) en 1880. C'est un universitaire
1. Archives nationales (AN), W1II-136, doc. 118, et J. Carcopino, Souvenirs de sept ans, Paris, Flammarion, 1953, p. 374- 375.
2. L. Darquier de Pellepoix, dans Le cri du peuple, 18 mai 1942.
3- Décret 3247 du 6 novembre 1942, JO du 14 novembre 1942.
de formation et de filiation. Fils d'un professeur d'histoire au lycée de Bergerac, il a fait une partie de ses études secondaires au lycée de Périgueux où son père a été nommé proviseur, avant d'être admis au prestigieux lycée Lakanal. Brillant élève, admissible (mais non admis) à l'École normale supérieure, il a entrepris des études supérieures à la Sorbonne et à l'École pratique des hautes études, qui débouchent sur l'agrégation d'histoire et de géographie (1905) et un diplôme d'études supérieures de droit (1907). Professeur en classe préparatoire dans différents lycées provinciaux (Limoges, Toulouse, Bordeaux), il a aussi occupé, entre 1909 et 1914, une chaire libre à la Faculté des lettres, chaire relevant de la Chambre de commerce de Bordeaux. En mai 1916, il soutient ses deux thèses de doctorat es lettres en Sorbonne: la première est consacrée au rôle patriotique de la société populaire de Bergerac pendant la Révolution, et la seconde à la mission de Lakanal en Dordogne en l'an II de la République.
À partir de 1914, l'universitaire a cependant opté pour une carrière d'avocat et d'homme politique. Républicain et défenseur de la laïcité, H. Labroue a été attiré par la franc-maçonnerie: en 1904, il est initié à la loge parisienne «Les droits de l'homme». Militant à la Ligue des droits de l'homme, il est élu député à Bordeaux, le 10 mai 1914, avec les voix des électeurs de gauche et s'inscrit donc au groupe républicain radical et radical- socialiste à la Chambre. C'est sous cette étiquette qu'il participe à la Commission de l'enseignement et des beaux-arts, avant d'être mobilisé en août 1914. Blessé sur la Meuse et décoré de la Croix de guerre, ce sous- lieutenant prend rapidement du galon (il termine la guerre capitaine) et on le charge, dans les mois qui suivent, de diverses missions parlementaires aux armées.
À l'issue du conflit, en 1918, de retour à la Chambre des députés, H. Labroue



LE COURS ANTISEMITE D'HENRI LABROUE
essuie deux échecs consécutifs à la deputation et devient alors avocat à la Cour d'appel de Paris. À nouveau candidat en 1928, il est réélu député dans le département de la Gironde, mais après avoir rompu avec la franc-maçonnerie et pris ses distances avec la gauche. Au cours de cette seconde législature, il n'en participe pas moins à une commission de l'enseignement où il défend l'idée d'une gratuité totale de l'enseignement secondaire pour les enfants issus de familles modestes. Par ailleurs, il s'implique dans des questions purement locales et notamment celles concernant la viticulture. Non réélu en 1932 et 1936 face à un candidat SFIO, H. Labroue s'inscrit alors au barreau de Bordeaux et consacre l'essentiel de son énergie au Cercle de la démocratie locale qu'il préside dans cette ville1.
Nous n'avons pas trouvé trace dans les archives consultées de déclarations ou d'écrits antisémites de H. Labroue à la veille de l'avènement du régime de Vichy. Pendant l'Occupation, L'Université libre, journal clandestin proche du PCF, généralement très bien renseigné, dénonce avec virulence «l'ignoble H. Labroue ... avocat véreux ayant mangé à tous les râteliers» puisque, avant la guerre, il aurait même participé à l'accueil en France des réfugiés juifs chassés d'Allemange nazie 2. Nous ne pouvons confirmer (ou infirmer) cette dernière affirmation, avancée par des universitaires totalement hostiles à H. Labroue, mais celle-ci paraît d'autant plus crédible que l'itinéraire politique de H. Labroue a été effectivement particulièrement sinueux dans l'entre-deux- guerres. De plus, dans sa jeunesse, loin de dénoncer le rôle néfaste des juifs, H. Labroue a très largement bénéficié de
1. H. Coston, Dictionnaire de la politique française, Paris, La Librairie française, tome 1, 1967, p. 587; J. Jolly, Dictionnaire des parlementaires français, Paris, PUF, tome 6, p. 2 069- 2 070, et documents du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) aimablement communiqués par Marc Knobel, que je tiens à remercier ici.
2. L'Université libre, 79, 10 mars 1943, p. 3-
leurs largesses en obtenant successivement le prix Rothschild et une bourse accordée par le banquier et philanthrope Albert Kahn. Grâce à ce prix et cette bourse, il a pu visiter, en 1907-1908, toute l'Europe occidentale et faire un tour du monde presque complet: Corée, Mand- chourie, Japon, Chine, Indochine, Canada, États-Unis... Au cours de ces voyages, H. Labroue a étudié «la répercussion des phénomènes religieux sur les phénomènes politiques» et le journal L'Union a même publié, le 25 janvier 1908, un de ses articles consacré à Ellis Island, intitulé «Au pays des déracinés»3. Rien ne laissait donc présumer, avant 1939, les engagements racistes et collaborationnistes de H. Labroue sous l'occupation allemande.
DANS LA TRADITION ANTISÉMITE FRANÇAISE
Aussitôt après la débâcle, H. Labroue s'engage pourtant résolument dans la collaboration et l'antisémitisme: il noue en effet immédiatement des relations étroites avec les occupants. La Propaganda Staffel lui délivre ainsi, dès le 2 octobre 1940, une autorisation pour la publication de son projet de «Voltaire antijuif». De plus, avec le soutien de l'ambassade allemande, il fonde à Bordeaux, en avril 1941, un institut d'études juives qu'il préside, et participe activement à la préparation de l'exposition «Le juif et la France» lors de sa présentation dans sa ville, en avril-mai 1942. À cette occasion, il fait d'ailleurs une conférence où il stigmatise le rôle néfaste des juifs dans toute l'histoire de France. C'est le même rôle qu'il s'efforce de démontrer à coup de citations sorties de leur contexte, la même année, dans son Voltaire antijuif A.
Dans ce pamphlet au vitriol, qui bénéficie, comme on l'imagine sans peine, de critiques élogieuses de la part de toute la
presse collaborationniste, il recense sans la moindre nuance toutes les citations antijuives du philosophe afin de démontrer à quel point, selon lui, l'antijudaïsme est une tradition française. C'est cette même idée qu'il va s'employer à développer à la Sorbonne, le 15 décembre 1942 entre 15 et 16 heures dans l'amphithéâtre Michelet, au cours de sa leçon inaugurale. Selon H. Labroue, en adoptant des mesures antijuives, la France ne s'abandonne nullement aux impulsions du vainqueur. En effet, pour lui, l'antijudaïsme n'est pas «un article d'importation: nulle nation dans le monde ne possède une tradition antijuive aussi longue, aussi continue, aussi totale que la nôtre». Et pour étayer sa démonstration, d'invoquer les mesures adoptées à l'encontre des juifs par les Mérovingiens, les Capétiens et leurs légistes ainsi que les écrits ou déclarations antijuives de Bossuet, Voltaire, du conventionnel Louis-Sébastien Mercier, de Napoléon 1er et ses jurisconsultes, de Balzac, des frères Goncourt, de Drumont, de Maurras, de Georges Vacher de Lapouge, des frères Tharaud, de Céline et de quelques autres1. Mais bien qu'H. Labroue s'efforce de mettre en avant la tradition purement française de l'antisémitisme et qu'il reprenne ainsi à son compte les stéréotypes traditionnels de l'antijudaïsme chrétien, il ne peut toutefois s'empêcher, dans son cours inaugural, de se référer aux travaux eugénistes d'Othmar von Ver- schuer, le spécialiste des questions raciales en Allemagne nazie, qui était aussi, comme on le sait aujourd'hui, le responsable hiérarchique des expériences menées à Auschwitz par le Dr. Mengele. Pour se faire une idée plus précise du contenu de la leçon inaugurale de H. Labroue, on peut citer ici quelques passages significatifs où le «professeur» affirme notamment que les juifs constituent «une sous-
race métissée par les races arménoïde et araboïde». Ce métissage étant, selon lui, à l'origine d'un faciès particulier: «Un nez d'ordinaire fortement convexe, des lèvres charnues dont l'inférieure est souvent proéminente (résidu probable des facteurs négroïdes), des yeux peu enfoncés dans les orbites avec ... quelque chose d'humide et de marécageux, et un rétrécissement de la fente des paupières où l'on peut voir une connexion mongoloïde». Et H. Labroue d'ajouter au «masque juif» qu'il vient de détailler d'autres caractères, selon lui moins fréquents et moins marqués mais toutefois notables: «Cheveux crépe- lés, qu'on peut rattacher à l'ascendance négroïde ; oreille grande, charnue, décollée; épaules légèrement voûtées; pieds plats ; un certain prognathisme ; une faible musculature du mollet, s'expliquant soit par un résidu négroïde, soit par l'état social citadin ; des doigts potelés avec poignée de main moelleuse et fondante; empreintes digitales d'un type spécial; odeur particulière traduisant peut-être les anciennes accointances négroïdes ; prédominance du sang B...»2.
Face à une telle accumulation de stupidités proférées dans la vénérable enceinte de la Sorbonne et dont nous n'avons donné ici qu'un très faible aperçu, l'émotion de l'auditoire, on le conçoit aisément, fut des plus grandes. D'autant que les responsables universitaires, loin d'approuver la création d'une chaire d'« Histoire du judaïsme» de ce type, pour laquelle d'ailleurs, contrairement à l'usage, ils n'avaient nullement été consultés, avaient au contraire d'emblée tenu à prendre leur distance à l'égard d'une initiative gouvernementale remettant en cause l'autonomie de l'Université. Le 21 novembre 1942, l'Assemblée des professeurs de la Faculté des lettres, présidée par le doyen Vendryès, exprime en effet
1. -L'histoire du judaïsme à la Sorbonne-, La Question juive en France et dans le monde, 7, janvier- février 1943, p. 26-42.









Faurisson, un antisémite
Faurisson se compare à l'ultra-collaborationniste antisémite Henri Labroue


Dans son introduction à ses Écrits révisionnistes, Faurisson, après s'être comparé à un politicien romain véreux, se compare à un autre « illustre prédécesseur » :
« Ayant eu à enseigner à la Sorbonne, je songe également à mon prédécesseur Henri Labroue, auteur d'un ouvrage sur Voltaire antijuif . A la fin de l'année 1942, en pleine occupation allemande, à une époque où l'on veut nous faire croire que les juifs et leurs défenseurs se faisaient le plus discrets possible, il dut renoncer à donner ses cours sur l'histoire du judaïsme. Citons André Kaspi : "Une chaire d'histoire du judaïsme a été créée à la Sorbonne pour la rentrée de 1942 et confiée à Henri Labroue. Les premières leçons ont donné lieu à des manifestations d'hostilité et à des incidents qui ont entraîné la suppression des cours »
Avant de voir qui était Labroue, précisons que Faurisson se garde de préciser que Kaspi, à la page même citée, écrit du cours de Labroue qu'il s'agissait de « cours prétendument scientifiques ». Faurisson est un habitué des citations partielles qui passent sous silence les passages qui le dérangent.
Car ce que Faurisson ne dit pas, c'est que Labroue était une fripouille collaborationniste, un des antisémites les plus virulents des milieux pro-nazis. Aussitôt après la débâcle, il s'était résolument engagé dans la collaboration et l'antisémitisme. Dès 1940, il propose spontanément ses services aux autorités allemandes pour participer au développement de la propagande antijuive en France. Labroue collaborait au Cahier jaune, une revue fanatiquement antisémite lancée par l'I.E.Q.J, l'Institut d'étude des questions juives, officine de propagande antisémite parrainée par les nazis, créée en mai 1941 par Xavier Vallat, premier commissaire aux questions juives du gouvernement de Vichy. Aux cotés de Labroue, on trouvait aux Cahiers jaunes des antisémites pathologiques comme Henry Coston et Pierre Antoine Cousteau
Labroue, réclama, à l'été 1941, la création d'une chaire d'« histoire du judaïsme » à Carcopino, ministre de l'Éducation, qui la lui refusa
En mai 1942, Labroue se répand dans la presse :
« La primauté de l'éducation antijuive est à ce point certaine que j'ai demandé au Président Laval que soit créée en Sorbonne une chaire d'histoire du judaïsme contemporain »
C'est la même année qu'il publie son Voltaire antijuif, pamphlet antisémite répertoriant sans la moindre nuance les passages antijuifs de Voltaire, afin de montrer à quel point l'antijudaïsme est une tradition française... On aura remarqué que Faurisson s'est abstenu de mentionner la date de publication de cet ouvrage antisémite, 1942, en pleine collaboration, au moment où les Juifs d'Europe étaient exterminés... Labroue avait obtenu l'autorisation de publier dès le 2 octobre 1940, auprès de la Propaganda Staffel Labroue avait fondé en avril 1941, avec le soutien de l'ambassade allemande, un institut d'études juives. Le programme de cet institut était antisémite et collaborationniste A la tête de son institut, il participa activement à la préparation de l'exposition ultra-antisémite « le juif et la France » lors de sa présentation à Bordeaux en avril-mai 1942. Labroue avait eu quelques difficultés à publier son Voltaire... Son pamphlet était jugé trop antijuif, selon ses propres termes, par les maisons d'édition françaises! En janvier 1941, il prit donc sa plus belle plume pour écrire directement à Joseph Goebbels afin de lui réclamer son aide. Et de fait le livre fut publié l'année suivante, par une maison d'édition allemande.
C'est le second responsable du C.G.Q.J, le Commissariat Général aux Question Juives, Louis Darquier, un antisémite virulent formé par Coston, qui appelait au meurtre des Juifs dès avant la guerre, qui prit l'initiative, avec l'approbation du successeur de Carcopino, l'ultra-collaborationniste Abel Bonnard, « admirateur délirant de la virilité nazie », de créer à la Sorbonne une chaire d'histoire du judaïsme en novembre 1942 Autrement dit une tribune pour proférer toutes sortes de thèses racistes et antisémites.
Voici comment Labroue présente son enseignement, juste après sa nomination, dans un numéro du très antisémite Cahier jaune :
« Non seulement j'espère ouvrir l'esprit de nombreux étudiants qui, je le souhaite, deviendront à leur tour des propagandistes, mais encore je forme le vœu que les futurs professeurs incorporent dans leur enseignement des lycées et collèges les matières qu'ils auront apprises à la Sorbonne. [...] Il faut espérer que, dans quelques années, il n'y aura pas une seule commune de France dont les enfants n'auront été instruits de cette question [la question juive], dont la solution comporte la vie ou la mort pour notre pays et pour l'avenir de la race »
Le poste est d'ailleurs créé, contrairement à l'usage, sans que la faculté de la Sorbonne n'ait été consultée, ainsi que le regrette son Doyen lorsqu'il apprend la création de cette chaire
Dans sa leçon inaugurale, Labroue se réfère aux travaux eugénistes d'Othmar von Verschuer, le spécialiste des questions raciales en Allemagne nazie, responsable hiérarchique des expériences menées à Auschwitz par le Dr. Mengele Voici quelques extraits -- et l'on aura bien à l'esprit que Faurisson se compare à ce personnage -- de cette leçon inaugurale :
« [les juifs constituent] une sous-race métissée par les races arménoïdes et araboïdes. [...] Un nez d'ordinaire fortement convexe, des lèvres charnues dont l'inférieure est souvent proéminente (résidu probable des facteurs négroïdes) des yeux peu enfoncés dans les orbites avec [...] quelque chose d'humide et de marécageux, et un rétrécissement de la fente des paupières où l'on peut voir une connexion mongoloïde [...] Cheveux crépelés qu'on peut rattacher à l'ascendance négroïde; oreille grande, charnue, décollée; épaules légèrement voûtées; pieds plats, un certain prognathisme; une faible musculature du mollet, s'expliquant soit par un résidu négroïde, soit par l'état social citadin; des doigts potelés avec une poignée de main moelleuse et fondante; empreintes digitales d'un type spécial; odeur particulière traduisant peut-être les anciennes accointances négroïdes; prédominance du sang B »
Claude Singer parle d'une « accumulation de stupidités [...] dont [on n'a] donné ici qu'un faible aperçu ». Le contenu du cours fait donc la part belle aux pires stéréotypes antisémites. Faurisson s'était bien abstenu de faire mention du contenu réel du cours de Labroue...
Ce contenu, en tous cas, ne semble guère avoir été apprécié des étudiants qui le huent et le sifflent. Marrus et Paxton rapportent :
« Lorsque Labroue qui avait soixante-deux ans, fit cours dans l'amphithéâtre Michelet, il n'avait devant lui, aux dires d'un observateur allemand, que trois à cinq étudiants réguliers. L'amphithéâtre était rempli de personnes venues le conspuer et le C.G.Q.J [l'officine antisémite dirigée par Darquier] dut envoyer des photographes pour permettre de les identifier »
Tout le monde, étudiants et professeurs ont marqué leur désapprobation du cours de Labroue. Il en sera de même à la Faculté de médecine de Paris où René Martial tenta d'introduire un enseignement raciste.
L'hostilité était générale dès la leçon inaugurale. Claude Singer rapporte que les professeurs en avaient été absents. Labroue y était apparu flanqué de Darquier et applaudi par les membres du C.G.Q.J, venus faire la claque. L'identité des participants avait été contrôlée. Mais ils n'avaient pas été fouillés. Quelques étudiants organisèrent donc un chahut pour protester contre l'entrée du racisme en Sorbonne. On peut avoir la certitude, malgré les insinuations de Faurisson qu'il n'y avait pas de Juifs parmi eux, et qu'il n'était point besoin d'être un « défenseur des Juifs » pour trouver les propos de Labroue parfaitement ignobles. Claude Singer rapporte que « l'ostracisme dont H. Labroue a été victime à la Sorbonne ne doit pas être seulement attribué aux étudiants. Les professeurs de la Faculté de lettres de Paris s'abstiennent tous en effet de lui adresser la parole »
Finalement ce ne sont pas les incidents qui précipitent la fin du cours, mais bien l'absence de plus en plus patente d'auditeurs! Le cours n'est pas tant supprimé que la plupart des séances petit à petit annulées par manque d'auditeurs. Le cours se poursuit ramené à deux séances hebdomadaires au lieu de trois, tout au long de l'année 1943. En 1944 la plupart des séances doivent être annulées faute de participants. Faurisson fait donc une présentation frauduleuse du devenir du cours de Labroue en prétendant que « A la fin de l'année 1942 [...] il dut renoncer à donner ses cours sur l'histoire du judaïsme ».
Labroue fréquente avec assiduité les réunions mondaines et pseudo-scientifiques organisées par les milieux ultra-collaborationnistes. Il publie un nombre impressionnant d'articles dans la presse antisémite (Au Pilori, Le Cahier jaune, La Question juive en France et dans le monde...) Labroue fréquente le Cercle aryen dirigé par Paul Chack, écrit dans Parizer Zeitung, Deutschland-Frankreich, Je suis partout, etc. En 1943, Labroue se rend propriétaire de biens « aryanisés » (c'est à dire confisqués à des Juifs -- décidément Faurisson est friand des voleurs de Juifs...). Il est très apprécié des Allemands, fait plusieurs conférences à Francfort en avril 1944. Il devait prendre la parole à Cracovie en juillet 1944 aux cotés de Rosenberg, Hans Frank, von Ribbentrop, Himmler et Goebbels Ce colloque, qui portait sur « Le judaïsme et la politique mondiale de notre époque », fut annulé à la dernière minute... Labroue savait mêler sa passion antisémite et son collaborationnisme pro-nazi dans des formules ramassées. C'est ainsi qu'en 1943, il apostropha Mgr Felin, en raison de l'attitude humaine des prélats français à l'égard des Juifs persécutés. Il le traita d'« archevêque judéo-gaulliste ». Jeannine Verdès-Leroux écrit à propos de Labroue qu'à « l'été 1944, il écrivait encore des articles d'un antisémitisme sans limite »
Le rejet de l'enseignement raciste de Labroue n'a pas pour origine une quelconque cabale des « défenseurs des juifs », mais est la réaction naturelle d'un milieu, celui des étudiants et professeurs de l'Université française, totalement allergique à l'ignominie raciste distillée par Labroue. Faurisson, voudrait faire croire qu'il y aurait eu une sorte d'« influence » juive derrière l'interruption du cours de Labroue. Mais il présente l'affaire de façon totalement frauduleuse, le plus gros de la fraude consistant à taire le pedigree infamant de Labroue...
La présentation frauduleuse de Faurisson concerne donc ici plusieurs points:

  • Il passe sous silence le fait que H. Labroue est un ultra-collaborationniste et un antisémite virulent qui reprend les pires délires nazis.
  • Il passe sous silence le fait que le Voltaire antijuif de Labroue est un pamphlet antisémite publié par une maison d'édition allemande après des pleurnicheries de Labroue auprès de Goebbels.
  • Il passe sous silence la nature proprement ignoble du cours de Labroue.
  • Il prétend que le cours de Labroue s'est interrompu à la fin 1942, alors qu'il a commencé le 15 décembre 1942 et que l'« interruption » fut progressive.
  • Il passe sous silence le fait que c'est la désaffection du cours et la désapprobation des autres professeurs qui ont conduit à l'annulation progressive de la plupart des séances, et non les incidents initiaux.

Par contre, personne ne sera surpris que Faurisson se compare à un ultra-collaborationniste et à un fanatique antisémite en tentant de le faire passer pour une innocente victime ne serait-ce que des « défenseurs des juifs »... Faurisson est un antisémite.



1940: l'ordre «nouveau»
27 juin. Deux phrases dans un coin de page de la Petite Gironde: «Jeudi matin, un détachement allemand a traversé la ville pour se rendre vers les lieux d'occupation. Il n'y a eu aucun incident.» Le 28, le général von Faber du Faur installe ses troupes dans les casernes, l'administration allemande dans les grands hôtels du centre-ville, la Feldkommandantur à la cité universitaire. Les travaux d'aménagement (2 millions de francs) sont à la charge de la commune. Bordeaux appartient désormais à la «zone occupée». Jusque-là, les 200 000 habitants vivaient au rythme des bombardements de mai et de juin, la ville croulait sous l'afflux des réfugiés de l'exode (plus de 1 million en Gironde).
Le 1er juillet, le préfet Bodenan fait les honneurs des salons de la préfecture au général allemand. Il lui offre des fleurs, un vase de cristal, cadeaux habituels de la Gironde à ses hôtes de marque. Au palais Rohan, siège de l'hôtel de ville, Adrien Marquet, un ancien socialiste réélu maire en 1935, plaide pour «l'ordre nouveau qui doit supprimer les inégalités, les injustices et les misères». Adrien Marquet vient d'être nommé ministre de l'Intérieur du premier gouvernement Pétain. A Vichy comme à Bordeaux, il va s'appliquer à «concilier les points de vue allemand et français». Bordeaux se transforme en trois jours. Le drapeau hitlérien flotte sur les édifices. Dans le port, les bateaux cèdent la place aux croiseurs et aux sous-marins. Les commerçants ont obligation d'accepter la monnaie allemande, 1 Reichsmark pour 20 F. Les troupes de la Wehrmacht ont la priorité dans les tramways. Le 1er juillet, à 23 heures, l'horloge de la cathédrale Saint-André est avancée d'une heure. Bordeaux se met à l'heure allemande. L'heure des «avis à la population»: avis de déposer, avant le 5 juillet 18 heures, les armes à feu à la Feldkommandantur et les fusils de chasse à la mairie; avis de ne pas klaxonner («Toute circulation dans l'intérêt privé en vue d'amusement est interdite», annonce la préfecture); avis de porter sur soi sa carte d'identité, de rédiger en allemand toute demande à l'administration, de camoufler les lumières. Puis, vient le régime des «jours sans viande»: les boucheries interdites le mercredi, jeudi, vendredi, les charcuteries, le jeudi et vendredi, le cheval et triperie, le vendredi. Après la surprise, les Bordelais commencent à protester. Au cinéma, où l'on donne la Route enchantée avec Charles Trenet, les spectateurs manifestent pendant les actualités. Le préfet avertit: «Une demi-clarté sera maintenue dans la salle et, en cas d'incident (cris de désapprobation, exclamations, opposition, etc.), la direction devra faire immédiatement pleine lumière ["] Les coupables seront arrêtés et incarcérés par les autorités allemandes.» Les autorités françaises tentent de calmer la mauvaise humeur. Conseil de la Petite Gironde: «Comprendre et se résigner.» Avertissement de la préfecture: «Toute lacération d'affiche apposée par l'autorité allemande est considérée comme un acte de sabotage et sera punie de la peine de mort.» Le 11 septembre, l'archevêque de Bordeaux, Mgr Feltin, appelle «au zèle et à la discipline» tous les curés, vicaires et aumôniers. Il demande aux catholiques «ordre, discipline et correction dans leurs relations avec les autorités allemandes», et prie les membres du clergé de «s'abstenir de toute politique». A l'automne, la vie reprend doucement: en foot, les Girondins BFC écrasent le Red Star olympique de Paris 8-0. Mais il y a couvre-feu de 23h30 à 3 heures, réduction obligatoire de la consommation de gaz. Le 17 octobre est publié un «avis aux israélites» pour qu'ils retirent, avant le 20 octobre à 18 heures, les formulaires des déclarations obligatoires de recensement. Il y a peu de protestations. Le 22 octobre, 5 172 personnes et 403 entreprises sont déclarées à l'administration. «Le gouvernement respecte les personnes et les biens des israélites, il les empêche seulement d'assurer certaines fonctions sociales», expliquent les journaux qui déplorent«l'influence juive ["] insinuante et finalement décomposante». Le 24 a lieu l'entrevue entre Hitler et Pétain à Montoire. Le 27, les courses de chevaux reprennent à l'hippodrome du Bouscat. A la Toussaint, une pluie «implacable et tenace» tombe. La chasse est ouverte. Seuls les militaires de la Wehrmacht ont le droit de la pratiquer, les Bordelais ne sont autorisés qu'à «détruire le lapin sauvage». Le 16 novembre, le maire Adrien Marquet annonce la démission de son adjoint Joseph Benzacar, 78 ans, frappé par le statut des juifs promulgué par Vichy en octobre. Un seul élu, Haurigot, commente: «Nous devons le regretter, car c'était un excellent homme.» Début décembre, à la gare Saint-Jean, un premier convoi de travailleurs, tous volontaires, part pour l'Allemagne: 115 hommes, terrassiers, charpentiers, mécaniciens, chômeurs, un père de douze enfants, prennent le train de 12h52. Direction Hambourg. A la fin de l'année, le Faust de Gounod est joué au Grand Théâtre.
1941: amendes et représailles Dans la nuit du 19 au 20 janvier, le sous-officier Heitz est attaqué par trois inconnus, place de la Cathédrale. Quarante-huit heures après, le général von Faber du Faur impose à la ville une amende de 2 millions de francs et un dépôt de garantie de 4 millions. La somme doit être «produite par la population tout entière» avant le 27 janvier. Deux mois plus tard, la garantie est restituée «en raison de l'attitude correcte de la population». La municipalité pose des centaines de plaques de rue. Les Bordelais savaient se repérer sans, pas les Allemands. Les grands négociants en vin font d'excellentes affaires: Heinz Bömers, le Weinführer dépêché par Berlin, est un ami de longue date des marchands des Chartrons. Fin avril, un ancien député, Henri Labroue, agrégé d'histoire, fonde un institut des questions juives, deux semaines avant l'institut parisien.
Le premier week-end de mai, les journaux annoncent que 111 adolescents «reprennent le goût du travail et l'amour de l'effort» au centre de jeunesse du bassin d'Arcachon où «ils ensemencent la terre, défrichent les forêts sous le signe de la bonne humeur». Le 10 mai, grand week-end de courses landaises. Le 15, la campagne de battage pour la moisson bat son plein. Deux nouveaux avis sont publiés. L'un à l'adresse des familles des «criminels» qui commettent attentats et sabotages: leurs proches parents masculins seront fusillés, les femmes envoyées aux travaux forcés, les enfants en maison d'éducation surveillée. L'autre interdit aux juifs l'accès de dix-sept lieux: jardins publics, théâtres, écoles. Le 6 août, on donne le départ de la course cycliste Bordeaux-Angoulême. Fin août, la police municipale est paralysée comme tout Bordeaux par la pénurie de carburant. C'est le cheval César qui tire la voiture cellulaire transportant les détenus. Le 20 août, un nouveau conseil municipal s'installe, désigné par Darlan, ministre de l'Intérieur. «Les partis ont disparu. Ils étaient des machines à interpréter les circonstances», se félicite le maire, Adrien Marquet, maintenu à son poste. Le tribunal correctionnel condamne les époux S. et Marie G., à huit mois de prison et 200 f d'amende. Marcel S., démobilisé en 1940, avait appris que «sa femme s'était mal conduite pendant son absence». Il a accepté de reprendre la vie commune à condition qu'elle avorte, Marie G. a fait l'opération. Le foetus était enfoui dans le poulailler. Une journalière de 52 ans, Marie Dupin, surprise à minuit dans un champ en train de ramasser deux sacs de pommes de terre, est condamnée à quatre mois de prison. Alfred B., docker, avait chanté l'Internationale au nez d'un brigadier de la sûreté. Le tribunal «admet l'excuse de l'ivresse»: un mois de prison et 600 F d'amende. Un tribunal spécial, chargé des «affaires à caractère communiste et anarchiste», siège pour la deuxième fois: il condamne Pierre Julien, 20 ans, et Pierre Facirès, 30 ans, à quinze années de travaux forcés pour distribution de tracts. Le 24 octobre, 50 otages sont fusillés en représailles de l'assassinat d'un officier allemand, le conseiller Reimers. Le même jour, Bordeaux et quinze villes voisines doivent verser 10 millions de francs avant 18 heures. Les conseillers paient à 17 heures, engagent la population à «seconder les pouvoirs publics dans la recherche des coupables» et déposent une couronne sur le cercueil. Le colonel Wolf leur adresse une lettre de remerciements.
Trois cents petits commerces juifs ont été fermés dans l'année, les entreprises plus importantes, une centaine, sont passées sous le contrôle de propriétaires «aryens».
1942: premières rafles Le 19 janvier, la préfecture de la Gironde révèle que les dénonciations anonymes augmentent. Le préfet dénonce ces pratiques «qui risquent de jeter la discorde parmi les Français». Désormais, une enquête de police sera ordonnée et les coupables feront l'objet de sanctions «extrêmement sévères». Le même mois, les rugbymen reprennent le Challenge de l'amitié. Du 27 mars au 10 mai, l'exposition itinérante «Le Juif et la France» fait halte à Bordeaux. Avec 60 000 visiteurs, le succès est immense, on y emmène les enfants des écoles. En avril, Maurice Sabatier devient préfet de région. Le 4 avril, les cinémas projettent Circonstances atténuantes, avec Michel Simon et Arletty. «Un film ultra gai», vante la publicité. Le 16 mai, Maurice Papon devient secrétaire général de la préfecture de la Gironde. Le 15 juillet à 21 heures, débute une première rafle de 70 juifs.
En août, le stade accueille le championnat de France d'athlétisme. Le 26 août, 443 juifs sont transférés à Drancy. Le 5 septembre, une section locale du groupe Collaboration inaugure son siège. Le 10 octobre, «à l'approche de la mauvaise saison et de la rentrée scolaire», la ville fait fabriquer 7 600 paires de sabots en bois blanc. Le lait pour nourrisson passe de 4 F à 5,20 F, l'accueil à la crèche de 2 à 5 F. La distribution de saccharine est fixée à cent pastilles par personne pour les six mois à venir. Le 7 novembre, Pétain lance la campagne d'hiver du Secours national sur le thème: «Si chacun de vous fait un geste, tous les Français seront sauvés.»
1943: sous les bombes Le 30 janvier, la municipalité envoie chocolats et brochures aux prisonniers. Le 13 février, elle cofinance l'exposition «Le bolchévisme contre l'Europe», grand succès public. Le 20 mars, on remplace les cercueils en chêne par des cercueils en bois blanc façon chêne «en tous points semblables». Le 17 mai, la ville subit la plus grave des quatorze attaques aériennes depuis le début de la guerre. La municipalité de Biarritz exprime sa sympathie aux victimes de cette «révoltante agression de la part des forces aériennes anglo-saxonnes», et celle de Ducey (Manche) envoie 4 boeufs, 31 veaux, 100 kilos de beurre, 8 000 oeufs. Bordeaux décide d'adopt er moralement les orphelins. Le 30 mai, deux manifestations artistiques fêtent la Journée des mères.Au début de l'été, le service des réquisitions des biens juifs fait ses comptes: 19 trains de 40 wagons sont partis pour l'Allemagne remplis de meubles, de vaisselles, de vêtements. La chaleur accable la ville, les piscines sont bondées. La durée du bain, fixée à une heure «habillage et déshabillage compris», est dépassée par les baigneurs. Le 7 août, le cheval Ardent, du service des inhumations, est «proposé pour la réforme» en raison de sa vieillesse. Le 30 août, s'achève le Grand Prix cycliste des Charentes. Le 19 septembre, le chef de la Résistance bordelaise, André Grandclément, est arrêté à Paris.
L'hiver est très froid. Dans la nuit du 20 au 21 décembre, 108 juifs sont arrêtés. Le 30, un nouveau convoi part pour Drancy.
1944: dernières exécutions Le 9 janvier, à la cathédrale Saint-André, se déroulent les obsèques des victimes d'un bombardement. Au premier rang, le préfet Sabatier, le maire, le Feldkommandant général Knoerzer et Maurice Papon. L'exposition Van Dongen est prolongée, les Girondins sont qualifiés pour les 8es de finale de la coupe de France de football. Le 6 février, Joseph Benzacar, l'ancien adjoint au maire destitué en 1940, et son épouse sont internés au camp de Mérignac. Ils ne reviendront pas d'Auschwitz.
Le commissariat à la mobilisation des métaux non ferreux remet à la ville un chèque de 1,5 million: le prix des ornements de bronze enlevés au Monument des Girondins. La maison Huilor expédie 115 litres d'huile de foie de poisson aux enfants des travailleurs français en Allemagne. La bibliothèque organise des «causeries» pour suppléer à la suppression des périodiques et chroniques littéraires. Une saison d'opérette est lancée au Grand Théâtre. 650 paires de galoches à tige montante en cuir et semelle de bois sont fournies aux employés municipaux.
Le 26 mai, la ville est encore bombardée. Le 21 juin, quelques jours après le débarquement en Normandie, deux convois partent encore pour Drancy. Le 1er août, 48 résistants sont fusillés. Le 5, le maire Adrien Marquet proteste auprès du délégué régional de la Milice qui, sans autorisation municipale, a rebaptisé la place de la République place Philippe-Henriot, du nom du secrétaire d'Etat à l'Information, speaker de Radio-Vichy, qui vient d'être exécuté par la Résistance. Le maire estime qu'«avec le temps, amis et adversaires d'Henriot s'élèveront à la sérénité qui permettra qu'hommage soit rendu à la mémoire d'un homme qui ["] a payé de sa vie la politique qu'il défendait». Le 22 août, Marquet préside son dernier conseil. Le 27, les Allemands quittent Bordeaux .

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